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Hommage aux victimes du terrorisme

l'histore de Noémie DELOBELLE


L'histoire de Noémie Delobelle épouse Suchet, décorée à titre posthume de la médaille de la Résistance française

 

Fabrice Bourrée

Responsable du service de la médaille de la Résistance française chez Ordre de la Libération - Hôtel des Invalides

Avec son aimable autorisation 

20 décembre 2024

La commission nationale de la médaille de la Résistance française (CNMRF) présidée par le délégué national de l'Ordre de la Libération est parfois confrontée à des injustices en terme de reconnaissance officielle et mémorielle.

Depuis quelques années, l'attention du délégué national a été attirée sur le cas d'une jeune résistance du Pas-de-Calais, Noémie Delobelle épouse Suchet. Agent des FTP à Burbure (Pas-de-Calais), arrêtée par la Gestapo le 5 août 1942, emprisonnée successivement à la prison de Béthune, à la citadelle d'Arras puis à la prison de Loos-les-Lille, arrive Noémie Suchet au camp de concentration de Ravensbrück le 26 novembre 1943. De là, elle est transférée le 14 avril 1944 à Holleischen, un kommando du camp de Flossenbürg où les déportées travaillent à la fabrication d'obus de défense anti-aérienne.

Avec deux autres détenues, Hélène Lignier et Simone Michel-Lévy , Noémie Suchet poursuit ses actions de résistance au sein-même du kommando . Par leurs sabotages récurrents, elles réussissent à faire sauter la machine qui pressait la poudre dans les douilles, privant ainsi l'armée allemande de quelques milliers d'obus. Un rapport sur ce sabotage fut transmis à Berlin qui ordonna que les trois femmes subissent chacune 25 coups de bâton. Puis, le 11 avril 1945, les trois déportées furent transférées sur ordre de Berlin à Flossenbürg où elles furent pendantes le 13 avril 1945, dix jours avant la libération du camp.

Simone Michel-Lévy fut décorée à titre posthume de la croix de la Libération (décret du 26 septembre 1945) et de la médaille de la Résistance française (décret du 31 mars 1947). Hélène Lignier, quant à elle, reçue aussi à titre posthume la médaille de la Résistance française par décret du 28 juillet 1955. Noémie Suchet ne reçut aucune de ces deux prestigieuses distinctions. Le 22 décembre 1947, la croix de guerre 1939-1945 avec étoile de vermeil lui est décernée à titre posthume. La mention « Mort pour la France » lui est attribuée le 19 mai 1950.

Sur une proposition de Vladimir Trouplin, directeur scientifique de l’Ordre de la Libération, le cas de Noémie Suchet est évoqué lors de la session du 22 septembre 2023 de la CNMRF. Il ressortait des éléments en notre possession que la non attribution par automaticité de la médaille de la Résistance était liée au fait que Noémie Suchet était titulaire du titre de déporté politique (obtenu le 16 juillet 1957) et non de déporté résistant comme l’exigent les textes législatifs en vigueur. Face à cette injustice, les membres de la commission ont accepté à l’unanimité que ce dossier soit soumis au président de la République. C’est ainsi que le secrétaire de la CNMRF, Fabrice Bourrée, a pris ce dossier en main et, grâce à l’aide de plusieurs chercheurs (Pierre-Emmanuel Dufayel, Jacques Pequeriau, Anne Savigneux) et diverses institutions (Arolsen Archives, SHD, fondation pour la mémoire de la Déportation, musée de la Résistance et de la Déportation de Besançon…) a pu considérablement enrichir ce dossier.

Grâce à l’appui de l’ONaCVG, partenaire essentiel de l’Ordre de la Libération, le titre de combattant volontaire de la Résistance a été accordé à titre posthume à Noémie Suchet en date du 3 avril 2024. Avec l’obtention de ce titre, Noémie Suchet devenait éligible à une proposition d’attribution de la médaille de la Résistance française. Avec l’accord de son fils Pierre, et de sa petite-fille Nathalie Wylleman-Suchet, le dossier a été communiqué pour instruction au ministère des Armées puis soumis à la CNMRF dans sa séance du 26 juin 2024. Un avis favorable a été émis à l’unanimité des membres de la commission. Suivant l’avis de la commission, le président de la République a décerné à titre posthume à Noémie Suchet la médaille de la Résistance par décret en date du 30 septembre 2024 (Bulletin officiel des décorations, médailles et récompenses du 9 décembre 2024).

Par cette attribution, Noémie Suchet a enfin et justement rejoint ses deux camarades de déportation, Simone Michel-Lévy et Hélène Lignier, au sein de la glorieuse cohorte des médaillés de la Résistance française.

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